L’encadrement de proximité, « de première ligne », intermédiaire, ce sont les personnes qui sont au plus près de ceux qui font le travail.
Tous ces cadres se disent « entre le marteau et l’enclume ». Ils doivent faire appliquer des règles de plus en plus prescriptives. Règles qui sont de plus en plus éloignées de la réalité du travail. Et règles que beaucoup de personnes encadrées transgressent, pour pouvoir bien faire leur travail.
Les cadres de proximité sont mis dans une situation où ils ont du mal à regarder le travail des subordonnés. Ils ont du mal à le voir.
Et quand ils l’ont regardé et vu, ils ont beaucoup de mal à le traduire (vers le « haut »), à cause des contraintes. Parce que se développent des formes clandestines du travail, qui ne peuvent être « dites ». Or ces formes clandestines sont aussi celles qui permettent que le travail soit fait.
Certains encadrent des personnes et pas le travail. D’autres encadrent le travail (les règles, la qualité, les procédures), mais pas les personnes. Et des « non cadres » encadrent des personnes sans avoir le « poids » du cadre.
Transgresser les règles pour bien faire son travail ?
Cela ne s’imagine pas dans des univers où des questions de vie et de mort sont en jeu : la santé, le nucléaire, l’aéronautique,…
C’est justement pour cela qu’il est passionnant d’aller y regarder de près.
En partant d’un exemple pour être concret, très finement analysé par Paule Bourret : la réalisation des transfusions sanguines. Quand une erreur d’attribution de groupe sanguin peut juste être fatale au patient.
La question de l’encadrement et des règles est aussi ancienne que l’organisation moderne du travail (Jean-Daniel Reynaud) ?
Elle prend une actualité très neuve. A cause du délitement des collectifs, du renvoi de chacun à lui-même. Et la spécialisation du travail fait que la connaissance d’origine du cadre de proximité, issu du rang, devient vite très limitée, obsolète sur le plan technique.
Le cadre de proximité doit se « débrouiller » avec l’ensemble de ces contradictions.
Bien les comprendre, tracer des pistes pour imaginer d’autres manières d’encadrer et de travailler avec : c’est le voyage que va proposer Paule Bourret à l’Université ouverte des compétences.
Jean Besançon
Directeur de l’UODC
Paule Bourret est également responsable du Master Analyse du travail et développement des compétences (CNAM) et auteure de Prendre soin du travail. Un défi pour les cadres de l'hôpital. Pour sortir le travail réel de son invisibilité (éditions Seli Arslan, 2011).