Il y a 20 ans, « on manquait d’informaticiens ». Aujourd’hui, après la Covid qui a servi de révélateur, on « découvre » que beaucoup de jeunes ne veulent pas aller là où il y a des centaines de milliers d’offres d’emploi. Et pénurie de candidats. Quel genre de métiers ? Tous ceux où il faut mettre la main à la pâte, où la main compte autant que la tête.
En France plus qu’ailleurs, peu de jeunes veulent spontanément faire un travail dit « manuel ». Tellement ces métiers sont mal considérés par la société toute entière, à commencer par l’école. Le travail manuel ? C’est la « bonne » orientation pour tous ceux qui ne sont pas adaptés au travail scolaire demandé. Ou qui s’ennuient trop à l’école.
Dans ce contexte, une jeune femme, Marie Blaise, qui a le culot de créer une école pour reconvertir efficacement des jeunes et des moins jeunes vers des métiers manuels (dits en tension), ça se regarde de près. Surtout si elle y arrive. Mais comment fait-elle ?
Amphi Débat organisé en mode hybride
L’école Gustave (en hommage à Eiffel) forme aux métiers où les entreprises « ne trouvent pas », dans les secteurs du bâtiment et de l’artisanat. Elle s’inscrit dans le courant de l’ESS (Économie sociale et solidaire).
Elle n’est pas la seule : alors qu’a-t-elle de particulier ?
D’abord Gustave recrute sur la personnalité, pas sur les diplômes (comme par exemple l’École 42).
Ensuite, elle part des besoins des entreprises. Classique, bien sûr, mais elle le fait vraiment. La hantise de Marie Blaise, c’est de créer une nième école pour quelque chose qui ne sert pas aux entreprises du secteur. Secteur dans lequel elle baigne, même si elle a aussi le profil d’une entrepreneuse dans l’Edtech’ ayant fait ses études en Espagne et en Australie : toute sa famille travaille dans le bâtiment.
Alors bien sûr on frémit en pensant à un adéquationnisme glaçant, enfermant les formé.e.s dans une conception purement utilitaire du travail et de la formation.
Mais voilà, Marie Blaise et ses équipes ont aussi beaucoup réfléchi à ce que signifie une reconversion. À 20 ou à 50 ans.
Qu’est-ce qui va faire que l’on veut s’orienter vers un métier dit manuel, donc mal considéré par l’école et la société française ?
Et qu’est-ce qui va faire que l’on va réussir dans le métier choisi, que l’on a de bonnes chances de s’y épanouir, de progresser, de créer peut-être un jour sa propre entreprise ?
Tous ces aspects sont présents au recrutement, mais aussi largement travaillés pendant la formation, qui mêle Maria Montessori et l’alternance. Les fameuses soft skills, on sent que ça compte un brin chez Gustave.
La première promo ? Plomberie chauffage. En 2022, devant le succès, un 2e métier : l’électricité, puis couvreur-zingueur en 2003. Et des campus ouverts à Lille, Lyon, Marseille, Bordeaux.
Le pitch pour trouver des apprenants ? Une école gratuite et rémunérée, qui recrute sur la personnalité et qui place chez les meilleurs entrepreneurs et entreprises des apprenants entre 20 et 50 ans. Avec un taux d’embauche post-formation de 94%.
Et côté entreprise, qu’est-ce que Gustave apporte ? Un pré-recrutement. Les présélectionnés – sur la motivation – sont présentés aux entreprises partenaires. Et ça marche. Qui finance ? Pôle Emploi et l’Opco Constructys.
Tout va bien ? Absolument pas, naturellement. Par exemple, Gustave peine à attirer des femmes, les circuits de financements sont complexes, etc.
L’UODC est très heureuse de vous inviter à débattre à partir d’un exemple concret de solution à une question qui traverse aujourd’hui l’ensemble du monde du travail : le recrutement. Et la fidélisation !
Il n’y a pas de solution universelle, mais le mot d’Einstein n’a pas pris une ride : « Donner l’exemple n’est pas le principal moyen pour influencer les autres. C’est le seul ».
Jean Besançon
Directeur de l’UODC
L'intervenante
Diplômée de l’ESADE Business School en 2015, Marie Blaise a suivi des études en Espagne, avant de travailler en Australie, en Inde, en Allemagne, au Nigeria, en France comme analyste financière, business development manager ou COO dans divers secteurs (Christian Louboutin, EdTech, HealthTech…).
En 2017, elle fonde Do It Abroad une start-up EdTech visant à mettre en relation les étudiants français et les universités à l'étranger. Son objectif est de démocratiser les études à l’étranger en palliant aux difficultés à trouver l’information nécessaire, au processus d’inscription compliqué et aux préjugés, qu’importe le parcours scolaire, la situation financière et le profil des étudiants.
En 2021, Marie Blaise fonde l’Ecole Gustave lorsqu’elle se rend compte de la pénurie de main d'œuvre qui existait dans le bâtiment. 200 000 offres d'emploi à pourvoir selon Pôle emploi : plombier chauffagiste, électricien et étancheur.
Elle s’entoure alors d'associés de la Rocket school, une école qui s'est donnée pour mission de former les demandeurs d'emplois aux métiers du numérique. Elle reproduit ce concept en proposant une formation gratuite, développée aux plus proches des besoins des entreprises et à destination de personnes vraiment motivées.
Près de 450 personnes ont été formées depuis la création (avec presque 10% de femmes dans les promos) sur des diplômes de niveau 3, soit l'équivalent du CAP et du BEP, en plomberie-chauffage et en électricité.
Au sujet de l'École Gustave
L’École Gustave est une école gratuite, financée par Pôle emploi, qui fait partie du groupe Rocket Education.
Dotée de 4 campus (Ile-De-France, Haut-de-France, Lyon et Marseille), elle forme les profils en reconversion professionnelle aux métiers du bâtiment en tension (plombiers-chauffagiste, électriciens, étancheurs), de l’artisanat et de l'industrie. Ces métiers demandent une maîtrise d’un savoir-faire opérationnel.
En combinant l'apprentissage technique du métier et l'apprentissage des soft skills (motivation, savoir-être, ponctualité et rigueur), la formation d'une durée de 3 mois d’apprentissage suivi de 12 mois en alternance en entreprise en contrat d'apprentissage (200 entreprises partenaires) permet à l'apprenant, âgé de 18 à 58 ans, de s'intégrer et s'épanouir dans l'entreprise qu'il rejoint et contribuer à son développement.
Entreprise de l’Économie Sociale et Solidaire, l’École Gustave a pour mission de redorer les métiers du bâtiment et de permettre à chacun de trouver sa vocation pour construire le monde de demain.
Gustave recrute sur la personnalité (sans condition de diplôme) et place ses étudiants en emploi vers des métiers à fort potentiel. Le taux d’embauche post-formation est de 94%. Son approche permet ainsi d’accélérer les carrières.
L’accent est aussi mis sur le développement durable et les économies d’énergie, pour construire les logements de demain, et rénover des logements pour qu’ils soient aux normes de demain. Par exemple, le plombier-chauffagiste a un rôle essentiel pour mieux chauffer et mieux isoler les logements, notamment grâce à la pose de pompe à chaleur.