Les injonctions à être heureux au travail, qui caractérisent le nouveau management, engendrent paradoxalement une fragilisation physique et psychique des travailleurs, qui ne parviennent pas à cet objectif illusoire.
En effet, ne pas y arriver, ou ne pas réussir à tenir ce paraître émotionnel sur la durée, devient une non-compétence, un stigmate de faillibilité personnelle. Selon les rhétoriques managériales, la solution repose sur le seul individu auquel il s’agit de fournir des outils d’autodiagnostic, d’autothérapie « clés en main » à travers une litanie de bons-mots-bien-dits-bien-faisants qui modifie en profondeur nos rapports au travail avec une focale exclusive : celle de l’individualisation responsabilisante.
Des spécialistes issus de différentes disciplines des sciences humaines et sociales analysent les transformations du monde du travail et leurs effets sur la santé. Si le mal-être et la souffrance s’accroissent statistiquement dans la réalité des entreprises, mais aussi des services publics, c’est probablement parce que le bonheur prescrit n’est qu’une coquille vide masquant un délitement des conditions…
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Sophie Le Garrec est sociologue, maître d’enseignement et de recherche à l’université de Fribourg, chaire francophone de travail social et politiques sociales.